par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 9 décembre 2009, 08-17351
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
9 décembre 2009, 08-17.351

Cette décision est visée dans la définition :
Partage d'ascendants




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'après le décès de son époux, Raymonde X..., veuve Y..., a, par testament olographe, réparti en deux lots les immeubles dépendant de l'indivision post-communautaire non liquidée et non partagée et en a attribué un à son fils, Daniel Y... et l'autre, à ses quatre petits enfants, Jean-Baptiste, Marie-Anaïs, Johanna et Judith Y... (les consorts Y...), venant à sa succession par représentation de leur père, Jean-Noël, décédé ; qu'après le décès de Raymonde X..., veuve Y..., et l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de sa succession, les consorts Y... ont demandé la nullité de l'acte qu'ils ont soutenu constituer un testament-partage ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Daniel Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Lyon, 13 mai 2008) d'avoir accueilli cette demande et d'avoir renvoyé les parties devant le notaire afin qu'il procède, selon les règles du droit commun, aux opérations de comptes, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté ayant existé entre les époux Y... et de leur succession, alors, selon le moyen :

1°/ que l'allotissement par testament-partage par l'époux survivant d'un bien dépendant d'une indivision post-communautaire est licite dès lors que, la communauté étant dissoute, les droits de l'ascendant et de ses héritiers sur les biens indivis sont d'ores et déjà déterminés et que le testateur a la faculté d'imposer à ses héritiers la charge de procurer à l'héritier qu'il désigne la propriété entière du bien légué ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1021 et 1075 du code civil ;

2°/ que l'interdiction de léguer la chose d'autrui, édictée par l'article 1021 du code civil, n'étant pas d'ordre public, il est loisible au testateur d'imposer à ses héritiers la charge de procurer à un autre héritier la propriété entière d'un bien lorsqu'il n'a sur ce bien qu'un droit de propriété indivis ; que ces dispositions sont applicables au testament-partage ; qu'en omettant de rechercher s'il ne résultait pas des dispositions testamentaires que Mme X... avait eu la volonté d'imposer à ses héritiers la charge de se procurer aux uns et aux autres la propriété entière des biens qu'elle désignait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1021 et 1075 du code civil ;

3°/ que, subsidiairement, en application de l'article 1079 du code civil, le testament-partage produit les effets d'un partage et interdit aux héritiers de renoncer au testament pour s'en tenir à la succession légale, afin d'écarter le partage fait pas l'ascendant et de provoquer un nouveau partage ; que M. Daniel Y... faisait valoir qu'en tout état de cause, ses neveu et nièces ne pouvaient tout à la fois accepter la succession de leur grand-mère et remettre en cause le testament-partage qu'elle avait établi ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, pourtant péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que l'ascendant ne peut inclure dans un testament-partage que les biens dont il a la propriété et la libre disposition et non ceux dépendant de la communauté dissoute mais non encore partagée ayant existé entre lui et son conjoint prédécédé ; qu'après avoir retenu, par motifs propres et adoptés, que l'acte litigieux s'analysait en un testament-partage et non en un testament emportant des legs particuliers et constaté que les immeubles attribués aux héritiers dépendaient de l'indivision post-communautaire, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses énonciations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que cet acte était nul, dès lors que Raymonde X..., veuve Y..., n'avait pas le pouvoir de procéder unilatéralement au partage des biens indivis dont les enfants étaient déjà saisis comme héritiers de leur ascendant prédécédé  ;

Attendu, ensuite, que seule l'acceptation de la succession donnant aux héritiers qualité pour contester la validité du partage testamentaire, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Daniel Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par Me Haas, avocat aux conseils pour M. Daniel Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré recevable et bien fondée la demande en nullité du testament de Mme X... et D'AVOIR renvoyé les parties devant le notaire afin qu'il procède, selon les règles de droit commun, aux opérations de comptes, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté ayant existé entre les époux Y... et de leur succession ;

AUX MOTIFS QUE M. Daniel Y... soulève l'irrecevabilité de la demande en nullité du testament-partage comme tardive ; qu'or, le jugement du 17 février 2005, devenu définitif, ayant fait droit à sa demande en liquidation et partage de la succession des époux X.../Y... et de la communauté ayant existé entre eux, ne s'est pas prononcé sur la validité du testament de Mme X... ; que si, dans le cadre de cette instance, les consorts Y... ont essentiellement contesté l'estimation de la valeur des immeubles de la succession, ils n'ont pas pour autant déclaré expressément qu'ils acceptaient l'allotissement décidé par leur grand-mère dans son testament ; que l'occupation par certains d'entre eux, en raison de leur situation matérielle, d'un appartement dans l'immeuble de Saint-Georges de Reinens, ne peut valoir acceptation non équivoque des dispositions testamentaires ; que, par conséquent, leur demande en nullité de ce testament formée dans le cadre de la nouvelle instance introduite par leur oncle ensuite de leur refus d'accepter le projet d'état liquidatif établi par le notaire, doit être déclarée recevable ; que la qualification de testament litigieux de testament-partage ne peut qu'être approuvée dès lors que la défunte a expressément manifesté sa volonté de procéder à la répartition en nature entre son fils, d'une part, et ses petits enfants, d'autre part, des immeubles qu'elle considérait comme ses biens ; que l'article 1075 du code civil accorde aux ascendants la faculté de faire par anticipation le partage de leurs biens ; que cette faculté est limitée aux biens dont chacun d'eux à la propriété et la libre jouissance ; qu'en l'espèce, les immeubles partagés par Mme X... proviennent exclusivement de l'indivision communautaire, qui a pris fin avec le décès de son conjoint, et s'est aussitôt transformée en indivision avec les héritiers de celui-ci ; que M. Daniel Y... n'est pas fondé à invoquer l'article 1423 du code civil et la jurisprudence appliquant les règles de droit commun des legs des biens indivis et du partage des indivisions ordinaires au legs consenti par le conjoint survivant d'un bien provenant de la communauté, dès lors que ces règles s'appliquent aux légataires et non aux héritiers du testament-partage ; que si l'ascendant, dans un partage testamentaire, peut aussi attribuer ses droits dans un bien indivis, ou même dépendant d'une masse indivise (sous réserve en ce cas du résultat aléatoire du partage de l'indivision), il n'a pas le pouvoir de procéder unilatéralement au partage de l'indivision post-communautaire en confondant en une seule masse ses droits et ceux de son conjoint prédécédé, dès lors que les héritiers de celui-ci en sont déjà partiellement propriétaires ; que la nullité du testament-partage de Mme X..., qui a reparti entre les co-partagés tous les immeubles de l'indivision post-communautaire, doit donc être prononcée ; que les parties doivent par conséquent être renvoyées devant le notaire déjà désigné pour qu'il procède, selon les règles de droit commun, aux opérations de liquidation et partage de la succession de Georges Y... et de Raymonde X... ;

ALORS, en premier lieu, QUE l'allotissement par testament-partage par l'époux survivant d'un bien dépendant d'une indivision post-communautaire est licite dès lors que, la communauté étant dissoute, les droits de l'ascendant et de ses héritiers sur les biens indivis sont d'ores et déjà déterminés et que le testateur a la faculté d'imposer à ses héritiers la charge de procurer à l'héritier qu'il désigne la propriété entière du bien légué ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1021 et 1075 du code civil ;

ALORS, en deuxième lieu, QUE l'interdiction de léguer la chose d'autrui, édictée par l'article 1021 du code civil, n'étant pas d'ordre public, il est loisible au testateur d'imposer à ses héritiers la charge de procurer à un autre héritier la propriété entière d'un bien lorsqu'il n'a sur ce bien qu'un droit de propriété indivis ; que ces dispositions sont applicables au testament-partage ; qu'en omettant de rechercher s'il ne résultait pas des dispositions testamentaires que Mme X... avait eu la volonté d'imposer à ses héritiers la charge de se procurer aux uns et aux autres la propriété entière des biens qu'elle désignait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1021 et 1075 du code civil ;

ALORS, en troisième lieu et subsidiairement, QU'en application de l'article 1079 du code civil, le testament-partage produit les effets d'un partage et interdit aux héritiers de renoncer au testament pour s'en tenir à la succession légale, afin d'écarter le partage fait pas l'ascendant et de provoquer un nouveau partage ; que M. Daniel Y... faisait valoir qu'en tout état de cause, ses neveu et nièces ne pouvaient tout à la fois accepter la succession de leur grand-mère et remettre en cause le testament-partage qu'elle avait établi ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, pourtant péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la valeur de l'ensemble immobilier situé à Saint-Georges de Reineins devait être ramenée à la somme de 606.800 euros ;

AUX MOTIFS QUE les appelants ne contestent l'estimation faite par M. A... des biens immobiliers de la succession que pour l'immeuble qui leur a été attribué par le testament-partage, c'est à dire celui situé 30 rue du Beaujolais à Saint-Georges de Reneins ; qu'ils reprochent à l'expert judiciaire de ne pas avoir tenu compte dans son estimation des conséquences persistantes des graves désordres subis par l'immeuble ensuite de l'exécution par le département du Rhône de travaux dans le cadre de la substitution d'un pont métallique à un passage à niveau ; que ces désordres ont, en effet, justifié la saisine par les époux Y... en 1959 du tribunal administratif de Lyon pour obtenir la réparation de leur préjudice ; que si l'issue de cette procédure n'est pas connue, il est cependant probable que les demandeurs ont obtenu une indemnisation qui leur a permis de faire procéder aux travaux de remise en état ; que l'immeuble a, en tous cas, était normalement habité par la suite ; que M. A... a indiqué qu'extérieurement, les bâtiments étaient dans un état moyen, voire correct ; que selon les constatations unilatérales de M. B..., qui, sur la demande des appelants, a procédé à la visite des lieux, et dont l'attention a été attirée sur ce problème, il existe toujours des fissurations et des déformations dans la partie est du bâtiment jouxtant la rue du Beaujolais au sud et la voie ferrée à l'est, comme le montrent d'ailleurs les photographies qui ont été prises ; qu'il considère que ces désordres rendent nécessaires la réalisation de sondages et d'études techniques pour restructurer le gros oeuvre ; qu'il signale également la vétusté de la couverture, dont ne fait pas état l'expert judiciaire, mais qui n'est guère contestable compte-tenu de l'ancienneté de la construction ; que sur la prise en considération des nuisances dues à la proximité de la voie ferrée et l'appréciation de l'état des parties privatives des deux bâtiments, il n'existe pas de contradiction significative entre les deux rapports et les estimations cohérentes de l'expert judiciaire doivent être retenues ; qu'en conséquence, il peut seulement être reproché à ce dernier de ne pas avoir suffisamment pris en compte la nécessité de procéder à des travaux de remise en état de la structure extérieure du bâtiment ci-dessus visée et du besoin de rénovation de la toiture ancienne ; que s'il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise, il est en revanche justifié de déduire de la valeur globale de cet ensemble immobilier fixée à la somme de 691.800 euros par M. A..., la somme de 85.000 euros correspondant à l'évaluation de tels travaux faite par M. B..., et de retenir, par conséquent, la valeur de 606.800 euros ;

ALORS, en premier lieu, QU'en rejetant la demande de nouvelle expertise tout en défalquant de la somme retenue par l'expert, celle de 85.000 euros, pour obtenir une nouvelle évaluation des biens immobiliers, tandis que les consorts Y... avaient seulement sollicité une nouvelle expertise sans demander à la cour d'appel, en cas de rejet de cette demande, de procéder à l'évaluation des biens, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS, en second lieu, QU'en se fondant sur l'expertise privée de M. B..., sans rechercher, comme elle y était invitée, si elle était opposable à M. Daniel Y... dans la mesure où elle n'avait pas été établie contradictoirement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 16 du code de procédure civile.



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Partage d'ascendants


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.